jeudi 3 juin 2010

Trop long

Ce soir ou demain, je viendrai à bout de ce roman de Blas de Roblès, Là où les Tigres sont chez eux (Prix Médicis 2008, Ed. Zulma). Il me reste une centaine de pages à lire sur les quelques 900 cents que compte l'ouvrage. J'avoue vivre cette conclusion comme une libération. Non que le livre soit ennuyeux, il est même souvent passionnant et mêle plusieurs époques et plusieurs pays, il met en scène de nombreux personnages, dont Athanase Kircher, un jésuite érudit de l'âge baroque. Mais n'ayant lu que quelques pages par soirée à cause de la fatigue, j'ai cru n'en jamais voir le bout.

Et puis je suis comme les élèves: je n'aime pas les gros bouquins, je ne les aime plus. Je trouve même que c'est une forme d'impolitesse de la part de l'auteur de s'étendre aussi longuement sur sa création. Faut-il être suffisamment sûr de soi et de son talent pour ainsi produire un roman de 900 pages! Mais n'est pas un génie de l'écriture qui veut. J'avais besoin, lorsque je l'ai choisi, d'aventures dépaysantes et peu contraignantes pour la concentration. Ça a marché au début et puis la lenteur de ma progression a fini par me crisper, de même que le recours systématique à plusieurs histoires côte à côte, histoires qui n'ont a priori rien à voir entre elles. Une sorte de "Lelouchisme" littéraire qui m'avait déjà un peu agacé dans un livre pourtant splendide celui-ci: Les Raisins de la colère.

Je crois qu'en plus, il ne me laissera pas un souvenir durable. Pourquoi? Je ne sais pas. Je crois qu'en littérature, au-delà du talent et du style, c'est comme ça: ça marche ou ça ne marche pas.

Ce ne sont pas les idées qui tuent:ce sont les hommes, certains hommes qui en manipulent d'autres au nom d'un idéal qu'ils trahissent avec conscience, et parfois même sans le savoir. Toutes les idées sont criminelles dès lors qu'on se persuade de leur vérité absolue et qu'on se mêle de les faire partager par tous. Le christianisme lui-même -et quelles idée plus inoffensive que l'amour d'autrui, n'est-ce pas?- le christianisme a fait plus de morts à lui tout seul que bien des théories de prime abord plus suspectes. Mais la faute en revient aux chrétiens, pas au christianisme! A ceux-là qui ont transformé en doctrine sectaire ce qui n'aurait dû rester qu'un élan du cœur... Non, cher ami, une idée n'a jamais fait de mal à quiconque. Il n'y a que la vérité qui tue! Et la plus meurtrière est certainement celle qui prétend à la rigueur du calcul. Métaphysique et politique dans la même poubelle, et allons-y pour le credo scientiste ou pour ce désespoir blasé, content de soi, qui légitime aujourd'hui les pires abandons...

4 commentaires:

Lancelot a dit…

AH ! On touche à son Steinbeck ! Lancelot bondit, l'écume aux lèvres : Les raisins de la colère ce n'EST PAS du "lelouchisme" tel que tu le définis. Il s'agit toujours de la même famille, les Joad. Simplement il a intercalé entre chaque chapitre du roman un chapitre informatif au niveau civilisation, sur les divers aspects de la crise. C'est vrai que ça pouvait être fratiguant. personnellement j'avais résolu le problème lors de la première lecture en sautant ces chapitres-là, mais j'avais passé un contrat avec moi-même : relire obligatoirement les autres chapitres, un par un. Lors de mes lectures suivantes de l'oeuvre (une bonne dizaine de fois) j'ai lu dans l'ordre et je me suis aperçu qu'en fait il existait une ewxcellente coordination, des échos et une fluidité dans l'alternance.

Ca va, ça va, je me calme.

Quant au phénomène du "trop long" pour les 900 pages de Blas de Robles, à relier au fait d'être "sûr de soi", je pense qu'il y aurait beaucoup à dire là-dessus. Mais mon commentaire est déjà bien long. J'arrête avant qu'il n'atteigne le seuil fatidique au-delà duquel tu t'endors...

KarregWenn a dit…

L'embêtant avec les bouquins longs c'est qu'il sont trop lourds pour lire au lit. À moins d'en faire des tranches ?
Sinon je propose que, de même qu'il y a des livres de poche, il y ait des livres de lit, petit format, couverture souple et papier bible.
J'aurais dû être éditrice.

D. Hasselmann a dit…

Pourquoi, sinon par masochisme ?, vous embêter à parler de ce pavé de 900 pages ?

Faites comme un élève peu sérieux : tournez les pages très vite et oubliez aussi rapidement !

Peut-être qu'avec un iPad, ça sera moins "lourd" ?

Calyste a dit…

Nous avons réglé le différent sur la lice, Chevalier!

Ah non! pas de papier bible, j'ai horreur de ça. Trop fragile, d'autant que je m'endors régulièrement avec le livre sur le nez!

Les dernières pages se sont effectivement tournées très vite, Dominique!