mardi 10 novembre 2015

Les feuilles mortes ne se ramassent pas toujours à la pelle


L'automne s'installant me remémore chaque année un souvenir lié au collège. Nous y avions un employé, aide-jardinier, qui aurait aujourd'hui à peine plus que mon âge s'il n'était mort d'une crise cardiaque il y a pas mal de  temps.

Il avait un physique lourd, un peu rustre. Il fallait le voir manger, à la cantine (nous déjeunions ensemble le mercredi, sans élèves. Les autres jours, il mangeait avant les enseignants) ! J'en ai eu l'occasion plusieurs fois et j'en suis toujours resté sidéré. Je me souviens en particulier d'une choucroute dont il a engouffré trois ou quatre assiettes sans broncher, s'arrêtant seulement pour la faire glisser en l'arrosant copieusement d'un vin qui avait plutôt tendance à décaper !

Bien sûr, après, la digestion était un peu difficile. Il s'endormait parfois à table mais, la plupart du temps, attendait d'être seul pour le faire. De la fenêtre de ma classe qui donnait sur le parc,  je le voyais souvent accoudé à son râteau, immobile : il dormait debout !

Je crois aussi que sa paresse n'était pas moindre que sa goinfrerie. Je l'ai surpris une fois, toujours de la même fenêtre, en train, avec son souffleur, de pousser les feuilles mortes sous les voitures des profs. Comme ça, on ne les voyait plus ! Enfin, jusqu'au soir. Mais ça, il s'en moquait. Ou n'y avait pas pensé.

Car il n'était pas non plus très futé ! Un jour d'automne que le jardinier en chef lui demandait d'aller fermer le portail du bas (le parc du collège est en pente et les deux portails, celui du bas et celui du haut, sont éloignés d'au moins trois à quatre cents mètres, avec des bâtiments entre les eux), il lui a répondu ingénument (?) qu'il faisait exprès de le laisser ouvert, pour créer un courant d'air. Courant d'air qui, selon lui, était censé, emporter les feuilles sans effort de sa part à lui !

Alors voilà : maintenant, lorsque je vois des tas de feuilles dans la rue, je pense inévitablement à lui. S'il est au paradis, j'espère seulement qu'il y a là-haut, un bon cuisinier et pas de parc à nettoyer ...

6 commentaires:

karagar a dit…

Il ne semble pas qu'il faille chercher bien loin les causes de sa mort prématurée...

CHROUM-BADABAN a dit…

Je me demande pourquoi faut-il toujours ramasser les feuilles !
Ramasser les copies !
Sur mon Île je n'en ferai rien, elles tombent, qu'elles tombent ! Et que le vent les souffle si elles se laissent emporter !

Cornus a dit…

Ah les histoires de feuilles m'évoque le cas d'un "jardinier" à Chinon qui devait avoir des attitudes un peu similaires avec la personne que tu évoques. Il est décédé durant la canicule de 2003, c'était un pauvre gars, mais il pouvait aussi être méchant vis-à-vis des autres. Il n'en ramait pas une. Je l'avais observé aussi : il donnait deux coups de râteau, tirait un coup sur sa clope, se reposait un moment sur le manche, donnait deux coups de râteau et ainsi de suite. Il a ainsi bien usé le soleil, mais il n'était pas le seul à procéder un peu ainsi, même s'il était champion. Je pense qu'il mangeait mal aussi et avait un embonpoint tel qu'à côté, je suis un petit garçon.

Calyste a dit…

Karagar : lorsqu'on m'a appris la nouvelle, je n'ai guère été surpris.

Chroum : moi aussi, j'aime ces tapis en automne.

Cornus : le nôtre, Dieu merci, n'était pas méchant. Bougon mais pas méchant.

karagar a dit…

Calystee> Trouver le moyen de glisser 'le nôtre' quand on parle jardinier, c'est très malin de ta part !!

Calyste a dit…

karagar : isn't it ?