mardi 21 avril 2009

Autobiographie.10: le récit d'un événement historique vécu par le biais de la télévision, la radio ou les journaux

Je ne suis pas encore au bout de la liste d'éléments demandés par mon cher collègue Nicolas en vue de la réalisation d'un dossier autobiographique. J'ai pour l'instant mis de côté un de ces éléments, non que je me refuse à le publier mais parce que je ne trouve pas dans mes archives ce que je cherche: la photo de moi lorsque j'étais enfant. Dès que je l'ai, promis, elle paraîtra. Pour patienter, allez donc voir celle de Jahovil, . Bon, d'accord, il est moins beau, mais tout de même, il n'est pas mal non plus! Et puis, ce petit derrière qui pointe innocemment, c'est beau, c'est frais!

Pour l'élément d'aujourd'hui, je n'ai pas hésité beaucoup. Quel événement historique m'a le plus marqué depuis mon enfance, en tout cas depuis que ma conscience politique est suffisante pour me permettre un jugement? Deux ou trois moments me sont passés rapidement par la tête: la catastrophe de Fréjus après la rupture du barrage de Malpasset en 1959 et la campagne pour l'élection présidentielle de 1965 entre autres. Pour le premier, je ne garde que de vagues souvenirs. Pour le second de ces moments, ma mémoire est plus précise: je me souviens fort bien de cinq des six candidats de cette année-là: Marcel Barbu, qui pleura à la télévision et dont j'ai retrouvé ensuite la mémoire par les travaux de recherches de Pierre sur la Communauté de travail que cet homme dirigeait, Marcilhacy, Lecanuet, Tixier-Vignancour pour l'extrême-droite et bien sûr De Gaulle, dont les apparitions télévisées, en tant que chef de l'Etat, avec l'image en noir et blanc et la Marseillaise avant et après, me fascinaient. Et celui que j'avais oublié? Mitterand dont je ne garde aucun souvenir lors de cette campagne. Je me suis rattrapé depuis, rassurez-vous!

J'aurais justement pu choisir son élection de mai 1981, mais je l'ai moins vécue devant la télévision que dans la rue, le soir du 10 mai, avec des milliers d'autres français heureux de cette victoire de la gauche. De plus, aujourd'hui, o tempora o mores, je craindrais que le rappel de cette joie ne fasse trop contraste avec les soupirs que je suis amené à pousser lors de déclarations de certains ou certaines à gauche en ce moment.

J'aurais aussi pu revenir sur le 11 septembre 2001 et les images qui tournaient en boucle sur toutes les chaînes de France et du monde entier: ces avions qui n'en finissaient pas de s'encastrer dans les deux tours de Manhattan devant les yeux de millions de gens médusés.

Non, l'événement qui m'a bouleversé, je peux employer ce verbe, est la chute du mur de Berlin. J'avais 37 ans et deux jours, ce 9 novembre 89. J'ai pleuré. De joie. Je savais que je vivais un grand moment, un moment historique. J'en avais conscience en direct, ce qui est assez rare dans une vie. Lorsque j'étais enfant, je ne comprenais pas qu'un pays, l'Allemagne, soit coupé en deux parties irréconciliables: si j'écoutais, horrifié au point d'en rêver, les récits de mes parents sur la guerre, je plaignais aussi ce peuple d'avoir perdu son identité. J'ai toujours aimé l'Allemagne et sa culture, je n'y peux rien. Quelques années plus tard, j'ai fait avec Pierre un voyage en Italie du nord puis en Autriche. J'ai découvert à ce moment là que Vienne n'était distante de Budapest que d'un peu plus de 200 kms. Et, devant le panneau indicateur qui marquait la direction de la capitale hongroise, je me suis senti à la fois impuissant, honteux et en colère. Ainsi, ce lieu dont le nom me faisait rêver était à portée de voiture et je ne pourrais m'y rendre, à cause de la folie des hommes!

En 89, j'ai pleuré, comme sans doute beaucoup d'autres gens de mon âge et plus vieux, nous qui nous imaginions que jamais, dans l'espace de notre vie, nous n'aurions l'occasion de voyager sans contrainte dans l'Europe réunifiée. Et cela se faisait. Des signes qui ne pouvaient tromper l'avaient annoncé mais je ne pensais pas que cela se produirait aussi vite et, j'ai envie de dire, aussi simplement. Une petite brèche, unique d'abord, puis les grilles s'ouvrent, le flux commence, d'est en ouest puis même d'ouest en est pour vérifier que c'est bien vrai, que ce n'est pas un rêve.

Je pleurais. Je crois que je pleurerais encore si j'en revoyais aujourd'hui des images. 28 ans de honte effacés par cette nuit tranquille: on peut se laisser aller à ses émotions! Le plus beau mot dans toutes les langues du monde ce soir-là, c'était Frei, Libre! Et puis, ce moment de bonheur intense encore, de beauté absolue: Mstislav Rostropovitch et son violoncelle et la musique de Bach, éternelle! Le xx°siècle finissait dans ces accords. Nous étions tous persuadés que le XXI° ne pourrait être que meilleur! La suite fut moins belle et je me souviens aussi du procès des époux Ceaucescu, à peine plus d'un mois plus tard. On avait déjà réinventé la barbarie!

7 commentaires:

Lancelot a dit…

J'étais en Amérique, pour un an.

J'avais vu ces évènements à la télévision aussi, mais je les avais ressentis avec moins d'intensité que toi. Ma soeur m'avait écrit une lettre qui contenant les mêmes accents de joie et d'alégresse que ceux que tu viens d'évoquer. Je l'ai encore.

Petrus a dit…

La chute du Mur m'a scotché devant la télé, j'avais aussi l'impression de vivre un moment historique.
Mais le 11 septembre m'a beaucoup plus marqué.
Avant, je n'étais pas né...

kranzler a dit…

Pour le mur aussi, j'ai pleuré de joie.

Aujourd'hui, j'habite Berlin et, malheureusement, tu sais quoi : il me manque. Tout est devenu banal, ici. Vrai de vrai.

christophe a dit…

Je me souviens bien de cette période, de 1989 à 1991, la chute du mur, du rideau et des régimes communistes. Ça m'impressionnait vraiment et je suivais tout cela de très très près... Quelques larmes d'émotion ne sont jamais loin quand je revois ces images qui promettaient effectivement - ainsi que tu le dis très bien - un avenir sinon radieux du moins apaisé. L'erreur terrible de la théorie de la "fin de l'Histoire" !

totem a dit…

Si chaque citoyen européen avait cette conscience universelle qui transparait dans ce billet...

C'est notre histoire a dit…

Bonjour,

Je suis journaliste pour l'émission C'est Notre Histoire, diffusée sur France 5 et présentée par Marie Drucker. Le prochain numéro sera consacré à l'élection de François Mitterrand en 1981:

http://documentaires.france5.fr/documentaires/cest-notre-...

C’est Notre Histoire est une émission participative et contributive. Il s’agit de raconter l'Histoire en donnant la parole à ceux qui l'ont vécue.
Notre émission sera consacrée à l'arrivée au pouvoir de Mitterrand et la première année de sa présidence.
Nous cherchons à rassembler un maximum de témoignages de Français qui ont vécu cette époque.
Vous souvenez-vous du 10 mai 1981 ? Quelles impressions gardez-vous de ce jour-là ? La joie ou la déception étaient-elles partagées autour de vous ? Avez-vous fêté l'événement? Comment?
Vous avez suivi le débat sur la peine de mort ? Qu’en avez-vous pensé ?
Avez-vous bénéficié des premières réformes sociales du septennat : semaine de 39 heures, cinquième semaine de congés payés, augmentation du SMIC, retraite à 60 ans? Racontez-nous...
Comment avez-vous vécu la création de l’Impôt sur les Grandes Fortunes? Les nationalisations?La dépénalisation de l’homosexualité? Le remboursement de l’IVG? En quoi ces réformes vous ont-elles affecté ? Cela a-t-il changé votre vie? Racontez-nous...
Filmez vos témoignages et envoyez-nous vos vidéos! Si vous avez des documents d'époque (affiches, photos, vidéos...), envoyez-les nous!

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Alice Papin
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Anonyme a dit…

j'ai la meme chose a faire pour un dossier autobiographique mais le seule problemes je ne sais pas quoi écrire car j ai jamais vecu et j ai pas compris ce qque je dois faire