vendredi 21 novembre 2008

L'attelage.

Le temps annoncé à la dégradation pour demain et dimanche m'a incité à aller courir aujourd'hui. Donc, après le repas avec J. et un petit tour chez le coiffeur qui ne m'avait pas vu depuis un temps certain, je suis allé tester mon sex-appeal de crâne quais rasé à la Tête d'Or.

Il tombait déjà une sorte de crachin, pas gênant pour courir mais plus handicapant pour des mecs à lunettes comme moi. Après un premier tour d'échauffement relativement calme, dans un temps qui, il y a un an, m'aurait fait rosir de plaisir, j'entamais le deuxième lorsque j'ai entendu quelqu'un se racler la gorge derrière moi. Surpris car je n'avais pas remarqué une présence et que j'étais perdu dans mes pensées, je me suis retourné et ai aperçu une silhouette qui, bien qu'encore un peu lointaine, ne semblait pas désagréable à regarder.

Je pensais que ce coureur allait rapidement me doubler mais, arrivé à ma hauteur, un peu en retrait, il a calqué sa foulée sur la mienne pendant quelques mètres, puis s'est ostensiblement mis à ma hauteur sans pourtant regarder autre chose que le chemin devant lui. J'ai pu le dévisager tout à mon aise.

Un homme de trente ans environ, pas très grand, pas petit non plus, brun et bien profilé, un visage mâle et des oreilles!!! Je ne vous dis que ça! Des oreilles que j'ai eu immédiatement envie de mordiller, de léchouiller, de déguster, des oreilles plus appétissantes que des macarons dans la vitrine d'un pâtissier (et j'adore les macarons!). Si un jour j'ai affaire à un psy, ce sera sans doute une de mes premières questions: pourquoi ces pulsions érotiques sur les oreilles?

Le beau brun se remit ensuite derrière moi puis, un peu plus loin, me doubla et s'installa devant moi. J'eus donc tout le loisir de détailler cette silhouette bien profilée dont je parlais tout à l'heure: il faut bien dire que la première chose que je regardai, c'est sa splendide paire de fesses, magnifiquement mises en valeur par le collant noir et bleu, comme le mien, des fesses fermes, pas mesquines et pas imposantes non plus, des fesses qui occupent bien la main dans leur exploration, qui généreusement proposent plusieurs itinéraires sans jamais se perdre dans des sables mouvants, des fesses dont on se dit, quand on les a connues, " j'y reviendrai un jour".

Je réussis tout de même à détacher mon regard de ce postérieur tentateur et le glissai sur les cuisses elles aussi gainées de près dans le collant. Même impression que les fesses: dessin parfait, du muscle sans rien de trop qui tuerait l'esthétisme, deux parenthèses fermées de chaque côté du bassin, et l'envie pour moi de les entrouvrir un instant pour m'en faire une écharpe. Les mollets étaient puissants: un sportif régulier, c'est sûr. D'ailleurs, je pus aussi lire lire sur son maillot une publicité pour un triathlon régional.

A la fontaine suivante, je m'arrêtai pour boire quelques gorgées d'eau afin de m'hydrater et il passa sans s'arrêter, mais ralentit très visiblement le temps que je le rattrape. Ce qui fut prestement fait. J'aurais bien aimé lui adresser la parole mais jamais il ne tournait la tête de mon côté, se contentant de courir près de moi. Je tournai régulièrement la tête pour revoir ses oreilles et ainsi nous achevâmes ce premier tour ensemble.

Le deuxième se fit aussi de conserve. Mais cette fois, j'avais renoncé à lui dire quoi que ce soit. Il s'était peu à peu créé autre chose, dans ce silence ponctué de nos souffles respectifs. Quelque chose comme un attelage de deux animaux dans l'effort, deux chevaux liés dans l'instant où ils bandent leurs muscles pour fournir l'effort commun. J'aurais aimé nous observer de l'extérieur: je pense que nous devions être beaux comme ça, inconnus et liés, attachés secrètement par le rythme de nos respirations, la vitesse de nos foulées qui s'allongeaient, se ralentissaient. J'avais l'impression de participer au déploiement du mouvement d'une machine bien huilée qui aurait pu parcourir des kilomètres. Sincèrement, ce que j'éprouvai à ce moment était aussi fort qu'un plaisir sexuel.

Quand je m'arrêtai, il continua, simplement. Il fallait revenir à la réalité. A peine les fesses sur le vélov', je ramassai sur la tête une violente averse de grosses gouttes glacées qui me transpercèrent immédiatement. J'y voyais à peine et le vent mêlé à la pluie ne m'aidait guère à progresser. Pourtant, je sifflais, je chantais, heureux, vraiment heureux de recevoir ce déluge, comme si, après la communion dans l'effort et la beauté de notre course, les dieux païens me purifiaient de leur ondée sacrée. C'est con mais c'est vraiment ce que je ressentais en rentrant.

Ce soir, je sens tout mes muscles du bas, je ne pourrais pas faire cent mètres de plus. Courir au même rythme qu'un triathlonien, c'est beau mais ça fatigue. Mais aucun regret, vous pensez bien!

7 commentaires:

Anonyme a dit…

Imaginons que cet autre coureur tienne aussi un blog. J'aimerais bien lire ce qu'il dit de sa course :)

Anonyme a dit…

Une occasion perdue... Ne nous dit pas que tu cours pour le sport. Pas à moi, non, non...

Anonyme a dit…

Calyste, ne les écoute pas, ils ne peuvent pas comprendre, comme dirait si bien l'Illuminée du Poitou. Jogger comme toi, je te comprends...Ah, un petit cul serré comme une pêche-melba dans un jean taille basse ou un short en lycra étroit...!

Anonyme a dit…

occasion pas vraiment perdue puis qu'ils (se s)ont chevauché ensemble ...si j'ai bien compris! ;-)

Anonyme a dit…

Moi ce que j'adore dans ton texte c'est le mélange note érotique + note sportive + note introspective + la 'note' ou 'touche' mystique sur la fin ! Le mélange est très réussi ! Bravo

Calyste a dit…

Une idée pour un prochain billet, Olivier. Je vais essayer de l'imaginer.
Si, Fabrice, je cours pour le sport, tous les sports!
Je vois qu'on a des points communs, Petrus! Je le savais bien un peu déjà!
Où est passée ton image, Piergil?
Peut-être, Lancelot, parce que chacun de nous est composé de toutes ces petites facettes, peut-être parce que je peux difficilement les dissocier, me séparer de ce qu'un utopiste (lequel? Fourrier peut-être) appelait les plaisirs composés. Merci de ton compliment.

Anonyme a dit…

courir est de toute façon excellent pour les fesses et plein d'autres choses...