lundi 6 mai 2024

Lecture

Enfant, j’ai quelquefois passé des jours entiers

Au jardin, dans les prés, dans quelques verts sentiers

Creusés sur les coteaux par les bœufs du village,

Tout voilés d’aubépine et de mûre sauvage,

Mon chien auprès de moi, mon livre dans la main,

M’arrêtant sans fatigue et marchant sans chemin,

Tantôt lisant, tantôt écorçant quelque tige,

Suivant d’un œil distrait l’insecte qui voltige,

L’eau qui coule au soleil en petits diamants,

Ou l’oreille clouée à des bourdonnements;

Puis, choisissant un gîte à l’abri d’une haie,

Comme un lièvre tapi qu’un aboiement effraie,

Ou couché dans le pré, dont les gramens en fleurs

Me noyaient dans un lit de mystère et d’odeurs,

Et recourbaient sur moi des rideaux d’ombre obscure,

Je reprenais de l’œil et du cœur ma lecture. (...)

Alphonse de Lamartine, Jocelyn

2 commentaires:

Cornus a dit…

Ah j'apprends ici que gramen n'est pas un mot de patois, ce qui justifie encore plus son emploi.

Calyste a dit…

Cornus : quand la poésie rejoint la botanique ...