jeudi 28 mars 2013

Parle-leur de batailles, de rois et d'éléphants

J'ai longtemps tourné autour du roman Zone de Mathias Enard. Et puis, j'ai renoncé à le lire, parce qu'il est trop volumineux (mais j'ai connu bien plus gros, au point d'être gêné par le poids, le soir, dans mon lit), parce qu'il ne comporte aucun signe de ponctuation (mais j'ai déjà avalé des pages et des pages sans un seul point). Sans doute, plus réellement parce que ce n'était pas le bon moment.

Alors, lorsque j'ai vu en rayon celui-ci, du même auteur mais nettement moins gros, je me suis dit:"Je vais essayer". Et j'ai bien fait. J'ai immédiatement été sensible à une certaine similitude d'atmosphère avec un autre auteur que j'aime bien: Laurent Gaudé (ou avec le Maxence Fermine de Tango Massaï). Une sorte d'attirance vers l'épopée froide qui permet le rêve.

Ici, il s'agit d'un personnage historique, Michel-Ange, et de son voyage à Constantinople sur l'invitation du sultan Bajazet, dans le but d'y construire un pont entre l'Europe et l'Asie, par dessus la Corne d'Or. Rivalité avec Léonard de Vinci, dont les plans ont été refusés, fuite devant le pape Jules II dont il n'a pas achevé le tombeau (mais pour qui il peindra plus tard, en s'enfermant pendant des années, les fresques de la Chapelle Sixtine), réflexion sur la vanité de l'art et la difficulté de l'amour du même, fascination devant les couleurs et les parfums de l'Orient, tout y est, sous forme de courts chapitres qui suggèrent plus qu'ils ne décrivent la vie de ce génie de la Renaissance qui, à ce moment-là, refusait encore sa part humaine.
(Mathias Enard, Parle-leur de batailles, de rois et d'éléphants. Ed.  Actes Sud.)

6 commentaires:

Cornus a dit…

Même si on peut s'y faire dans certains cas, j'ai beaucoup de mal avec les phrases sans ponctuation. Ou avec les phrases trop longues. Je finis par me lasser (une sorte d'essoufflement).

plumequivole a dit…

Ah voilà qui me tente assez !
C'est drôle, les phrases longues je m'y engage comme dans un labyrinthe, j'adore ça, plus c'est tortueux plus j'aime, et pourtant perso je ne sais écrire qu'avec des phrases courtes, très courtes parfois, et généreusement ponctuées !

CHROUM-BADABAN a dit…

J'ai trouvé "Zone" dans une poubelle ! Je ne suis forcé, efforcé, astreint à le lire jusqu'au bout. Pour voir !
Je ne l'ai pas trouvé intéressant du tout. Je n'y ai rien découvert. Probablement parce que je suis un lecteur assidu de la presse internationale... "Zone", c'est ce que je considère comme un livre-piège... Je l'ai offert à un ami-ennemi, pour lui faire perdre du temps !
Je suis parfois méchant !
Dans le genre sans ponctuation, j'ai beaucoup aimé "Eden, Eden, Eden..." de P. Guyotat, je crois... Là c'est puissant et c'était un ouvrage sulfureux, censuré pendant des années (guerre d'Algérie... oblige...)
En revanche, je me suis laisser aller, bercer, par le Mathias Enard, "Parle-leur de batailles, de rois et d'éléphants"
Une fabuleuse fable !
Très beau...
Quand aux livres de six cents pages et plus, il faudrait inventer une sorte de lutrin pour les lire au lit sans risquer une tendinite !

karagar a dit…

"C'est drôle, les phrases longues je m'y engage comme dans un labyrinthe", olalala, Plume, cette phrase m'a bien fait sourire ! (pardon Calyste pour cette intrusion)

plumequivole a dit…

Karagar > Oui tu peux rire mais tu as tronqué la citation !Il manque "j'adore ça, plus c'est tortueux plus j'aime"!
Et c'est aussi pour ça que j'ai tellement de goût avec la traduc de Savinien.
(pardon Calyste pour cette autre intrusion)

Calyste a dit…

Cornus: alors, il ne faut pas que tu lises Proust!

La Plume: idem pour moi, en ce qui concerne l'écriture. Dans mes rédactions, à l'école, c'est ma mère qui brodait.

Daniel: peu de chance donc pour que je fasse l'effort de lire Zone. En revanche, je dois avoir un livre de Guyotat qui traîne quelque part.

Karagar: intrusion? Tu es toujours le bienvenu!

La Plume 2: toi aussi, bien sûr.