Il s'agit là de l'un des animaux les plus symboliques de toutes les
religions. Traiter le sujet à fond serait trop long. Aussi, comme
d'habitude me contenterai-je d'aborder presque uniquement le bassin
méditerranéen, en délaissant volontairement les mythologies aztèque,
nordique ou orientale .
Tout semble
commencer, dans l'état actuel de nos connaissances, par l'ouroboros, un
serpent (ou un dragon ?) qui se mord la queue et forme ainsi un cercle
parfait, présent, entre autres, en Égypte ancienne. Il représenterait là
la limite entre le "noun", l'océan primordial, et le monde ordonné,
puis, logiquement, le cercle du temps et de l'éternité. Mais parfois,
l'interprétation est négative : se mordant la queue, il serait le
symbole de l'autodestruction et de l'anéantissement, du début et de la
fin de toutes choses.
La forme circulaire a donné lieu
à une autre interprétation : l'union du monde chtonien (infernal),
figuré par le serpent, et du monde céleste, figuré par le cercle. Union
de deux principes opposés, par conséquent : celle du ciel et de la
terre, du bien et du mal, du jour et de la nuit, du Yin et du Yang.
Chez
les gréco-romains, il est souvent question du basilic, souvent
représenté comme un petit serpent au venin et au regard mortels ( alors
que le Moyen-Age le décrit comme un mélange de coq et de serpent tout
aussi maléfique). Basilic, du grec "basileus", roi, le roi des serpents,
alors que les romains le nommaient "sang de Saturne". Les grecs pensaient
qu'il était né, comme tous les serpents, du sang de la tête de Méduse,
trachée par Persée, et que le seul antidote contre lui était les larmes
de phénix (facile à se procurer, comme on peut le penser...). Les romains
lui attribuaient au contraire des propriétés médicinales pour guérir
certaines maladies et lutter contre les envoûtements.
N'oublions
pas non plus Python, serpent monstrueux des grecs, fils de Gaïa (la
Terre) ou d'Héra selon d'autres légendes. Il veillait sur l'oracle de
Delphes, d'abord consacré à Thémis, déesse de la justice, puis à Apollon
lorsque ce dernier le transperça de ses flèches pour se venger du
monstre qui, sur les ordres d'Héra, avait pourchassé sa mère Léto, alors
enceinte du dieu et de sa sœur Artémis. Lorsque Apollon se fut rendu
maître des lieux, l'oracle fut nommé Pythie et, pour apaiser la colère
d'Héra, Apollon créa les Jeux pythiques, les plus importants du monde
panhelléniques après ceux d'Olympie.
Enfin, le serpent de la Genèse, le tentateur d'Eve qui lui fit manger la pomme, ce qui nous valu, à nous, pauvres humains, pas mal de pépins, dont le premier fut d'être chassés du Paradis terrestre. Et c'est justement là que le serpent finit par se mordre la queue, puisqu'une tradition de l'Océan indien, d'inspiration védique et européenne, décrit le père du dieu Kérdik, dieu solaire ou démon, comme un dieu-serpent nommé Paradis, mot venant du persan pairi daéza (enceinte royale), entourant le jardin des dieux pour les protéger des créatures indignes.
Curieusement, peu de serpents célèbres dans la littérature : Gros Calin de Romain Gary, le boa (sans nom) qui essaie de dévorer Milou dans Tintin au Congo et finit lui aussi par se manger la queue, et Kaa dans Le Livre de la jungle. En revanche, de nombreux titres de polars incluent le mot serpent. Deux d'auteurs célèbres : Le serpent, de Mickey Spillane, et Vipère au sein, de James Hardley Chase. Et, pour finir, un roman que j'ai adoré à mon adolescence : Vipère au poing, d'Hervé Bazin.
J'avais beaucoup aimé aussi Vipère au poing et Folcoche m'avait beaucoup marqué. Je n'ai vu aucune des retranscription filmée.
RépondreSupprimerSinon, les serpents dans la sculpture romane... dont le serpent à trois têtes du Jugement dernier d'Autun...
Im' sembloit que je n'en avois que deux (têtes) à Autun...
RépondreSupprimerQuelle érudition Calyste ! sans m'engager sur le domaine symbolique et mythologique, j'ajouterai "Gros Calin", le python de compagnie du roman de Romain Gary.
RépondreSupprimerCornus et Chroum : si ce sont les serpents qui mordent les seins d'une femme, il serait logique qu'il y en ait deux, mais je ne suis pas absolument sûr.
RépondreSupprimerJean-Pierre : je m'y connais un peu en mythologie gréco-latine, c'est vrai. Le reste vient de recherches sur internet où, d'ailleurs j'apprends beaucoup de choses (origine du mot "paradis", par exemple). Quant à Gros Calin, j'y ai pensé en cours d'écriture et puis ai oublié de la mentionner. Je vais le rajouter de ce pas.
Je pensais avoir répondu ce matin. Je persiste et je signe : je parle d'un serpent à trois têtes que je connais depuis si longtemps... La preuve en image chez moi.
RépondreSupprimerAh oui, Cornus a raison, j'ai retrouvé une photo que j'avais prise du portail du narthex : le serpent à trois têtes est enroulé dans les jambes d'un démon qui tire le plateau de la balance pour influencer la pesée des âmes...
RépondreSupprimerEt je vois aussi sur une autre photo deux serpents à une tête enlacés, emmêlés, et qui sucent les seins d'une femme.
=> pas de serpents à deux têtes mais un serpent à trois têtes !
Cornus : je ne l'avais pas vu, celui-ci.
RépondreSupprimerChroum : c'est ce dernier que j'avais en tête.