J'étais bien décidé à ne rien écrire sur le sujet. Pourquoi ajouter des mots aux mots, aux images, à l'explosion d'informations essentielles ou anecdotiques, avérées ou invérifiables? J'ai appris l'événement, avant-hier soir, par la page d'accueil de Yahoo. A aucun moment, je n'ai ouvert la télé, j'ai préféré écouter la radio, plus concise d'abord, puis cédant elle aussi à l'avalanche de réactions, d'analyses, de retours en arrière et que sais-je encore. Alors, j'ai moins écouté la radio aussi.
Je parle ici bien sûr de la libération de certains otages en Colombie, et particulièrement d'Ingrid Bétancourt.
Ce qui me fait sortir de mon silence et passer outre ma décision, c'est que, en lisant des blogs que j'aime, écrits par des gens que je respecte, je tombe non seulement sur ce sujet polémique mais aussi sur la polémique elle même, le déclenchement d'un tir nourri de part et d'autre. Et pardonnez moi, mais je trouve ça non seulement dommage mais en plus très con.
Commencer à s'étriper sur un événement qui, a priori, ne devrait être que joie et soulagement, ce n'est pas possible! Je craignais ce dérapage sur les médias, je le retrouve sur les blogs.
Parlons peu, parlons bien. Il me semble que, quel qu'ait été le scénario véritable de cette libération, opération à la James Bond, paiement d'une rançon, infiltration, exfiltration, ou autres, ce qui compte avant tout, c'est cette libération, la joie d'une famille et de milliers de gens, le soulagement d'une femme restée prisonnière pendant six ans. Savoir si nous avons été trompés, sur son état de santé par exemple, qui nous a trompés, dans quel but, cela est peut-être important, mais pas essentiel pour l'instant, cela pouvait attendre un peu. Pourquoi ternir ces moments par des doutes et des suspicions immédiats, même si de cette fable, nous sommes peut-être, les dindons?
Moi, quand j'ai appris cette libération, j'en ai été profondément bouleversé, un peu, oui je n'exagère pas, comme au moment de la chute du mur de Berlin. Parce que toutes deux, chute comme libération, sont des symboles, des preuves que se battre contre la dictature, contre la corruption, contre toute forme d'oppression de l'être humain,qu'elle soit de droite ou de gauche, peut parfois réussir. On peut, avec un peu de foi ou de persévérance, soulever des montagnes.
J'en connais une, effectivement, dans l'ouest,qui aurait mieux fait de se taire. Mais elle n'en est pas à sa première "bavure". Reprocher à quelqu'un de vouloir tirer la couverture à lui alors que, pendant ce temps, on se bat bec et ongles pour en récupérer un petit bout, de cette couverture, il y aurait de quoi sourire si ce n'était pas lamentable.
D'autre part, la grande scène finale devant l'Hôtel de Ville de Paris, ce soir, en ce moment peut-être, qui en est l'instigateur? Un certain Bertrand Delanoë, maire de la capitale. Je sais bien que, depuis qu'il parle de libéralisme, certains doutent de son placement sur l'éventail politique, mais tout de même: on ne peut aller jusqu'à dire qu'il fait partie du Conseil du Prince?
Alors, s'envoyer à la figure son appartenance ou ses penchants politiques, reprocher des mots indiquant la croyance religieuse (au passage, elle a parlé de la Vierge Marie, pas de Dieu, il me semble), à quoi cela avance-t-il? On croirait que tout bonheur, tout moment de sérénité est a priori suspect et que l'on doit, par tous les moyens, découvrir là où le bât est censé blesser. Accordons-nous un peu le droit au plaisir, à la pitié, à la commisération, à la compassion et réagissons ensuite, en restant clairvoyants, s'il le faut: le Prince n'a sans doute pas dit son dernier mot ni fait son dernier geste.
Étrange d'ailleurs cette habitude actuelle de plus en plus présente chez nos politiciens, de lancer des phrases sans apparemment réfléchir au poids des mots, puis de se retrancher sur le malentendu, sur le hors-contexte. Il faudra donc réapprendre aux journalistes à faire leur métier (pourquoi pas?) et aux hommes (et femmes) politiques à mieux choisir leurs mots (si c'est bien payé, je veux bien postuler!) et surtout le moment pour les dire.
Pour finir dans la décrispation (je l'espère), ces quelques mots justement, d'elle, entendus à la radio tout à l'heure et où il n'y a rien à reprendre: " Il y a des jours devant moi, des jours vides à remplir de bonheur." C'est tout le mal que je lui souhaite!
Il n'empêche que ça ne justifie pas tout un pataquès médiatique, pas à ce point, pas aussi théâtralisé. Parce qu'à ce point, il est un réel manque de respect pour tous les autres qui souffrent d'une captivité identique, et peut-être moins provoquée.
RépondreSupprimerDésolé, mais je ne la fermerais pas !
Et je ne supporte pas qu'on me prête des propos faux parce qu'on n'a pas su lire correctement, et qu'on m'insulte en public qui plus est !
Je crois que, profondément, nous sommes tous d'accord. Personne ne remet en cause la souffrance de n'importe quel otage. Elle n'a pas à se peser sur telle ou telle balance de droite ou de gauche. Il ne s'agit pas de la faire "fermer" à qui que ce soit. Il s'agit simplement de rester serein, sans être soi même otage de ses convictions. Et là, je ne m'adresse pas qu'à toi.
RépondreSupprimerPour l'insulte, j'espère ne pas être concerné.
Tu es toujours aussi sage....Je ne pensais pas te voir réagir si vite !
RépondreSupprimerSi j'en suis coupable, je veux bien t'adresser mes excuses les plus "personnelles et sincères". Mais, comme toi peut-être, j'ai été touché par cette affaire, la détresse de ces enfants et le calvaire subi par cette femme (et par d'autres otages, je le sais bien) pendant plus de 6 ans.
Je regrette que notre (ou le tien, je crois) ami Olivier ait une réaction aussi excessive, à mon goût, que j'ai pu l'avoir, je le confesse bien volontiers.
Mais, pour moi, un blog est non seulement le journal intime de ses sentiments mais également le lieu où l'on peut confronter, même virilement et abusivement, ses convictions, surtout si elles sont honnêtes.
Sage? Pas toujours, enfin je me comprends.
RépondreSupprimerTu ne m'as pas froissé. Je crois simplement que vous vous êtes tous les deux laissés emporter. Mais ne t'inquiète pas: je sais très bien faire aussi (quitte à en être profondément perturbé ensuite)! Il faudrait que tu demandes à certains de mes collègues de travail...
Je crois aussi sincèrement que, aussi bien l'un que l'autre, vous êtes des êtres vrais, entiers et sincères. Et c'est ça qui compte, à la fin.
Je trouve que tu es un peu injuste avec la réaction de Ségolène Royal sur le récupération politique de cette libération car Guéant, secrétaire général de l'Elysée avait dit juste avant que Sarkozy n'était pour rien dans cette libération. Pourquoi alors reprocher à Royal de l'avoir répété? Ce qui me choque, ce sont plutôt les réactions de Fillon et Raffarin, qui la traitent de "petite fille dans une cours de récré" ou de "second couteau de la politique française". Mais qu'est-donc Raffarin sinon un second couteau de la poltique française? Chiraquien sous Chirac et Sarkozien sous Sarkozy, il n'en peut plus de se vendre au plus fort du moment. Quant à Fillon, on ne peut que rester stupéfait de la considération qu'il porte pour les femmes en politique!
RépondreSupprimerMais que rajoutait son intervention? Que risquait-elle sinon de déclencher ce qui arrive en ce moment? Elle aurait tout gagné à se taire. Une hypothèse que j'émets: n'essaie-elle pas sans cesse d'acquérir une dimension politique internationale, dimension qu'elle n'a pas à mon avis? Aurait-elle dit la même chose si, à ce moment-là, elle s'était trouvée en France?
RépondreSupprimerCe que je n'aime pas chez elle, c'est son côté "donneuse de leçons", un peu comme Jospin à une époque. Quand on se rapproche de l'évangéliste américain, moi je fuis.
M'oui...
RépondreSupprimerGrand débat tout ça en effet...
Il est cependant évident qu'il semble, vu hors de vos frontières, qu'il y ait une certaine récupération médiatique. Pourquoi faut-il que la famille d'Ingrid s'affiche autour de votre président ?
Pourquoi médiatiser à ce point les retrouvailles d'une famille ? Pourquoi ne pas poser encore aujourd'hui et plus que jamais la question sur la dangerosité des médias qu'on appellait à une époque, à juste titre, le quatrième pouvoir ?
Pourquoi Ingrid a-t-elle été la grande invitée de TF1 ?
Ces questions restent des questions mais, comme toute interpellation, elles ont le droit ultime d'être posées.
Merci, Christian, pour ton point de vue hors frontières. Bien sûr qu'il y a récupération, comme chaque fois, il faudrait être naïf pour le nier. Pourquoi médiatiser les retrouvailles? Pour la même raison que toujours: panem et circenses, du pain et des jeux, du sensationnel et des larmes. Mais ça, ce n'est pas nouveau. Rappelle-toi la petite fille que certains ont regardé mourir en direct face à la caméra lors d'un tremblement de terre en Amérique centrale, je crois. Et lorsque quelques-uns s'insurgent, on leur répond liberté de la presse et des médias.
RépondreSupprimerTu verras, dans un jour, dans deux, il y aura autre chose.
Quant aux réactions, questions ou interpellations, elles ont, pour te citer, "le droit ultime d'être posées. Mais je rajoute: pas forcément n'importe quand.